Inédit

Les fins d'année sont souvent ce qu'elles sont, ce qu'elles peuvent, on peut même certaines fois se demander, en reconsidérant l'année qui s'achève, qu'en dire, qu'en retenir. 
2020 aura échappé à toute catégorie, à toute habitude, à toute règle. 
Une année coupante, au plus profond. 
 
Alors, au moment d'en "terminer" ici avec elle, de refermer la porte, de la laisser, de la lâcher en rase campagne et d'aller voir ailleurs, il m'a été très facile de savoir ce que j'allais publier ici. 
Pour la petite histoire, c'est dans un échange avec Paula, en plein Printemps des Poètes, que celle-ci a attiré mon attention sur ce texte. Merci ! 
 
Je pense vraiment que la lecture de ce texte si fort va nous emmener du bon côté !
A bientôt,
 
 
 
 
 

J’ai attrapé la poésie.

Je crois que j’ai serré la main

à une phrase qui s’éloignait déjà

ou à une inconnue qui avait une étoile dans la poche.

J’ai dû embrasser les lèvres d’un hasard

qui ne s’était jamais retourné vers moi.

J’ai attrapé la poésie, cet espoir virulent.

 

Voilà un moment que ce clair symptôme de jeter

les instants devant soi était devenu une chanson.

Ne plus être confiné dans un langage étudié,

s’emparer du mot libre, exister, résister

et prendre garde à ceux qui parlent d’un pays mort

alors que ce pays aujourd’hui nous regarde.

 

À présent, on m’interroge, c’était écrit :

« Votre langue maternelle ? » Le souffle.

« Votre permis de séjour ? » La parole.

« Vous avez chopé ça où ? » Derrière votre miroir.

« C’est quoi alors votre dessein, étranger ? »

Que les mots soient au monde,

même quand le monde se tait.

 

J’ai attrapé la poésie.

Avec, sous les doigts, une légère fièvre,

je crève d’envie de vous la refiler,

comme ça, du bout des lèvres.


 

Carl Norac (né en1960 à Mons, Belgique) 

– Deuxième poème de Carl Norac en tant que Poète National.

https://www.midisdelapoesie.be/73e-saison/

 

Investigation

En cette affaire embrouillée, le privé, enquête de sens, filait une métaphore.

Sans quitter le banc des yeux, en planque devant un bouchon, il s’efforçait de tenir le liège. Il avait déjà échafaudé un autre flan d’attaque, et avec un suspect récalcitron c’était un zeste de précaution. Comment parvenir assez fin ?

Il avait voulu baigner la girafe. Mauvais plan, il aurait dû penser aux gestes carrière. Un peu comme pour les blagues panthère, trop incorrect, un humour noir à éviter. La montée des zoos, ça va vite, on panique, on peut écraser un connard à l’orange. 

De leurs côtés, le suspect réfléchissaient. 

Oui, le schizophrène ne se retournaient pas, comme s’il avait peur de son nombre. Le guide Maupassant n’avait été d’aucune aide, aucun Horla là. Ni loi. Ni foie gras. Pour lui, la voix de son maître, c’était de la pâtée macronie.

Enfin, on localisa le corps du délire, non loin d’une charpente maritime. Ce n’était autre que Guillaume le concurrent, un homme pourtant averti en vaudou.

Oh, les secours étaient déjà las. Une bouée d’oxygène flottait près du noyé.  Le sauveteur jura comme un charcutier. A l’impassible nul n’est tenu.

C'était trop tard. Échec, une fois de plus, un vrai râteau de la méduse. 

C’était toujours pour lui la quadrature du siècle, une vaine démarche jusqu’au bout triste que les seuls pleureurs comprennent. 

Alors seulement, il retira sa cotte de paille.

 

Inanimés...

C'était il y a quelque trois ou quatre ans, un enchaînement nous a conduit, un camarade de longue date et moi, à ce que vous allez trouver ici aujourd'hui. 
J'en mets en ligne des extraits seulement.  

Au départ, dans ma boîte aux lettres, la réception de cette carte postale : 

 

 
J'en transmets une copie à mon pote.
 
Immanquablement, chez lui et chez moi, le lien s'opère bien sûr avec la célèbre série des "Martine" version parodique qui semble devenue sur la toile une sorte d'incontournable souvent trash et incorrect. 
Par exemple :
 

 
 
C'est à ce point que les rouages respectifs de nos cerveaux s'enclenchent et que, au texte et au dessin, une idée germe, qui reprend l'inspiration de notre immense poète national spécialiste des lacs de montagne. 
Ainsi apparaît un possible personnage -dont le prénom qui n'est pas Alphonse est vite trouvé - dont l'activité est essentiellement ménagère, qui lorgne et peut rappeler Raymonde du côté des Bidochon, et qui ressemble à ça : 


 (c) tous droits réservés
 
 

Un abécédaire suivra objet par objet.  Textes et dessins continueront à se croiser. 

La dernière touche que j'y ai mise à l'époque vous permet de retrouver les objets utilisés.

 

ôde à La Martine

 

Toujours à fond les machines

Au four et au moulin farine

Ça turbine

 

Elle, c’est les brèves de bassine 

Elle patine pas dans la margarine

Elle en fait pas des tartines

 

Dégagez les rustines

Virez l’aspirine

Tirant de ses pieds toutes les épines

C’est pas le poète qu’elle assassine

 

C’est la poussière qu’elle extermine 

La Martine


 

Écoutant le poète inspirateur

Elle empoigne l’aspirateur

    Sans gants ni peignoir

    Elle veut vider la baignoire

Si dit qu’INRI c’est pas triste

Car Henri rit d’INRI le Christ

    Elle vérifie que coreligionnaire

    C’est toujours dans le dictionnaire

Au plafond tes conseils de chapelle,

(pense-t-elle) Fais-nous la courte, échelle

    Parfois le compotier fait du bruit

    Tel Salomon se fendre la poire porte ses fruits

En cherchant quelque ésotérique guérison

Le plus spirituel, de loin, c’est le guéridon

    Elle fait un nœud à son mouchoir

    Pour se souvenir -olé- des exploits du hachoir

Et prend note justement

De LA dépendance des instruments

    Elle convient que ce n’est pas la faconde

    -Y a pas photo- qui caractérise la Joconde

Facteur champêtre ou garde gendarme, besoin de répit ?

Elle finit par se mélanger sérieusement les képis

    Elle n’ira pas gloser sur le Bateau ivre

    En ce cas-là toutes les choses ont une fin, dit le livre

L’heure d’été elle est pas contre

Mais pas question de jouer la montre

    Elle oublie parfois de relever le Martin

    Vitrifié à sa brouette en nain de jardin

Tournevis et forme de vis pas assortis ? elle l’emboutit

Qu’importe si on frise le vis de forme question outils

    Elle préserve d’un œil protecteur

    Les siens d’un mauvais coup du projecteur

Elle n’a pas exactement toutes les billes

Sur l’étrange sexualité des quilles

    Est-il vraiment réparateur son sommeil

    Quand elle fracasse le réveil ?

Elle tombe sans délai sur le râble

De ceux qui piétinent les règles du scrabble

    Elle ausculte la presse devant la fenêtre

    Pour servir d’arbitre aux thermomètres

Et ne s’inquiète pas de se faire traiter de fossile

Par la folle danse des ustensiles

    Avec son chien au nom d’occase

    Ça passe ou ça casse, et valse le vase

Elle calcule sur les conseils éclairés de son cabinet

E = WC2 et va voir si c’est resté allumé aux vécés

    Pas demain la veille qu’elle reçoive au téléphone

    Un coup de Phil pour son xylophone

Elle ne se retire pas en concile sous sa yourte

Pour déjouer les attentats terroristes au yaourt

    Non, elle époussette les haricots et les nigauds célèbres

    Qui font les malins, les drôles de zèbres.

 

 

 

 
 

Flash info

    Mise à jour  après une pause de trois mois, un nouveau blog  TEXTURES a démarré le 18 mai 2022. Ici.